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Peur bleue

Peur bleue

Cela fait maintenant plus d’une semaine que je suis arrivée au PachaMama, et je n’ai pas encore réussi à dompter ma peur. Hier soir, un énorme insecte volant de la taille de deux pouces, terriblement bruyant et encombrant, est entré dans ma casita: entre le bourdon géant mutant et le grillon, il ne maitrise pas bien son vol et atterrit lourdement sur mon mur. Je le reconnais et je sais que c’est lui qui la nuit émet ce bruit si assourdissant en frottant ses ailes, donc hors de question qu’il passe la nuit à un mètre de moi! Je respire un bon coup, et malgré ma peur et mon aversion, je prends un verre et une feuille de papier et j’entreprends de le capturer… Hop! Il se met alors à voler comme un fou dans mon verre, à taper de tous côtés en emmettant ce bruit décuplé de frôlon qui me répugne! Il est à présent prisonnier dans mon verre, alors j’enfile mes tongues à la hâte, dévale les escaliers le cœur battant, je le sens qui se débat comme un fou pendant que je m’éloigne le plus loin possible de ma chambre et là, le plus dur reste à faire: en tremblant, d’un geste désespéré, j’ôte la feuille et tente de l’expulser du verre le plus loin possible. Mais, attiré par la lumière de ma lampe torche frontale il se met à voler de façon totalement incontrôlée en ricochant contre moi, je hurle de dégoût et m’ébroue tout en courant…
Ouf, il ne m’a pas suivi… Je rentre dans la casita en tremblant, et, loin d’être soulagée, j’entends tout à coup des bruits de feuilles à deux pas de moi qui me font penser qu’un animal est là à m’observer… Je ne peux pas le voir et n’ose pas diriger ma torche dans sa direction, j’ai trop peur de ce que je vais y voir!! Je ne parviens pas à retrouver mon calme, le souffle court, j’enfile ma chemise de nuit en quelques secondes, éteins les lumières et me réfugie dans mon lit sous la moustiquaire qui devient mon refuge, ma bouée de sauvetage, ma terre d’asile… j’enfonce mes boules quies dans mes oreilles et ainsi, telle l’autruche mettant sa tête dans le sol, je me coupe du monde extérieur… Je préfère ainsi ignorer le danger potentiel et calmer ma paranoïa croissante!
Une dizaine de minutes passe ainsi et là, j’entends un autre bruit si persistant que mes boules quies ne suffisent plus à le contenir et je me réveille tout à fait, je tends l’oreille, le souffle court, et j’entends un son de griffes gratter derrière ma mini porte en bois… Cette fois, la terreur à remplacé ma peur, j’ôte mes boules quies et prends ma torche frontale en criant des “psssht” pour éloigner l’animal, le bruit à cessé mais je ne perçois pas de fuite… alors je me lève courageusement et pose bruyamment mes pieds sur le sol en bois pour lui imposer ma présence, là j’entends plusieurs animaux détaler dans la nature… Ils sont partis, ouf! (Le lendemain j’apprendrais que ce sont des gros ratons laveurs, ou coalis ou des putois qui cherchent la nourriture dans les casitas). Je me recouche, remets mes boules quies et éteins la lumière en essayant de retrouver mon calme… à peine deux minutes passent que je sens une secousse nette de mon lit comme si quelqu’un s’amusait à le faire bouger! Mais qu’est-ce que c’est?? Mon cœur se met à battre à 100km/heure, des gouttes de sueur perlent sur mon front et, paniquée, je rallume ma lampe et regarde partout autour de mon lit… Rien, dans cette region du monde il y a souvent des secousses… mais au même moment, dehors à quelques mètres, j’entends des bruits inquiétants que je suis incapable d’identifier… Une sorte de couinement d’oiseaux mourants, ou peut-être se sont des souris qui étouffent? Ce son dérangeant et aigu monte et monte de façon entêtante, je retiens ma respiration pour tenter vainement d’analyser et ranger dans une catégorie rassurante cet étrange bruit à quelques mètres de moi. Terrorisée, je décide pourtant de m’approcher du côté ouvert de ma chambre, la peur au ventre et, en respirant un bon coup, je dirige ma lampe dans cette direction, le bruit s’arrête… Je scrute fiévreusement la pénombre, au début je ne vois rien, juste cette immense jungle obscure qui m’entoure… Mais tout à coup, je vois! Face à moi, une paire d’yeux brille dans le noir en me regardant fixement… Je retiens un petit cri de peur et retire aussitôt le faisceau pour ne pas l’effrayer, car je comprends que c’est un singe assis dans un arbre à deux mètres à peine de ma casita… Mon cœur bat à tout rompre… Et à cet instant, comme dans les films d’horreur, il me semble entendre comme un grognement sourd, comme si des animaux autour de moi étaient énervés et avaient l’intention de m’attaquer! Est-ce mon imagination? Je suis tétanisée et trop effrayée pour sortir en courant chercher de l’aide, je me sens prisonnière dans mon 5 mètres carrés, ma tanière… Cette sensation est horrible, une immense solitude m’envahit, les idées les plus noires traversent ma tête, je n’ai aucune arme pour me défendre…je m’assois sur mon lit en essayant de rassembler mes idées pour trouver une solution constructive… depuis quelques instants le son s’est arrêté… Et je reste là, figée pendant 2-3 minutes qui me paraissent une éternité, et décide finalement de me recoucher en laissant la lumière allumée, incapable de remettre mes boules quies, cette fois, je devrais affronter les bruits de la nuit pendant mon court sommeil.
La nuit passe ainsi, avec ses bruits et ses animaux qui se promènent ou m’observent, un vrai cauchemar nocturne, et, évidement, rien ne m’est arrivé…

imagema casita

imageLe monstre

imageSinge hurleur

imageHomeless inoffensif

 

3 comments

  1. Valerie ROBERT

    Merci Bénédicte pour ce bon moment de lecture. J’ai decouvert votre article depuis mes vacances au Costa Rica.
    Il est écrit avec beaucoup d humour et d’authenticité, j ai adoré.
    Merci pour ce partage

    Valérie

  2. L’angoisse!!!

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